Mémorama : les mémoires de la guerre d’Algérie à Marseille

Les 9 et 14 décembre, Civic Fab était à Marseille pour deux ateliers Mémorama sur le thème des mémoires de la guerre d’Algérie. Après des ciné-débats autour du film Cartouches Gauloises de Mehdi Charef, les jeunes vont maintenant s’approprier ses mémoires de manière créative. Les contributions seront exposées lors de l’exposition Mémorama prévue en mars 2023.

 

Carnet de bord du 9 décembre : un atelier sous situation électrique instable

C’est vendredi 17h30 il n’y a déjà plus de bus au métro Geze pour se rendre à la cité Font vert. Je cherche un taxi sans succès, toutes les excuses sont bonnes pour refuser la course, mais je suis déterminée, le Mémorama, je le ferai.
J’arrive enfin à trouver un taxi, la nuit est déjà tombée. Nous arrivons à la cité Font vert… Il faut maintenant trouver le bâtiment G2.  Les habitants sont méfiants, ils ne nous connaissent pas, donc ils ne nous renseignent pas. A force de chercher, c’est devant une mosquée, qu’un monsieur nous explique comment retrouver notre chemin. Dans le local, nombre d’adolescentes et adolescents sont présents avec leurs mères. J’installe le rétro-projecteur afin de visionner Cartouches Gauloises de Mehdi Charef.

Il est l’heure, après une introduction de présentation, je lance la projection. Et là durant 20 minutes un va et vient incessant se met en place…. Des jeunes rentrent, d’autres sortent, mais nous sommes toujours une bonne vingtaine… ça ne change pas.
Au bout d’un moment, le groupe formé, la tension du film se fait ressentir par son silence. Tout le monde est captivé. Malgré les bruits, et les rats qui se font exécutés dehors…

Au bout de plus de 45 minutes, nous sommes victimes d’une coupure de courant. Toute la barre d’immeuble est touchée. Cela ne passe pas. Nous entamons donc le débat avec les lampes torches de nos smartphones. Au bout d’une dizaine de minutes la lumière revient puis repart puis clignote pendant encore plusieurs minutes. Nous débattons sur le film, sur les mémoires des deux pays, la France et l’Algérie. Nous continuons sur les œuvres que les jeunes souhaitent réaliser avant de nous quitter face à une situation électrique instable.

Il est 21h, en partant le plus jeune des spectateurs me demande le lien du film, il veut absolument le revoir. Je lui en fais la promesse en attendant les œuvres pensées dans l’obscurité des aléas de la cité et qui seront mis en lumière en mars 2023 dans une belle galerie.

Mémorama

Carnet de bord du 14 décembre : Wassim et l’envie de réaliser un film

Mercredi, j’arrive vers 13h, mon train est très en retard. Je cours pour arriver à l’heure au Centre social de la Corderie dans le 7e arrondissement de Marseille près du vieux port.Tout est déjà installé. Par contre les jeunes sont moins nombreux que prévus. Mais attentifs, ils écoutent et posent des questions.

Un jeune m’interpelle, il s’appelle Wassim. Il me demande la durée du film, il ne reste pas assis. Je comprends que Wassim est autiste. Je parle avec lui et le rassure. Il passera un bon moment et il tiendra. Il a effectivement tenu 1h30 de film. Il a regardé Cartouches gauloises de Mehdi Charef en entier, debout, mais en entier.

A la fin, autour d’un goûter, nous avons débattu. Les jeunes ne s’arrêtaient plus. Ils avaient plein de questions sur la véracité des faits historiques évoqués et ce qu’ils avaient envie de raconter. Des groupes ce sont déjà formés et dès lors, le centre social a mis à disposition tout le matériel nécessaire pour créer.

Les jeunes m’ont demandé de leur laisser jusqu’à janvier et sont partis heureux. Seul Wassim est resté près de moi. Je lui ai demandé s’il savait ce qu’il ferait, il a acquiescé et m’a demandé quand est ce que je pourrai revenir car il voulait faire d’autres ateliers. Je lui ai rappelé que je revenais dès la semaine prochaine pour un atelier sens critique. Il m’a dit qu’il serait là et qu’il voulait faire un film. Il est parti satisfait et moi aussi car en plus de ce Mémorama, cet atelier a ouvert la voie à un autre public.